Travelling

Névrosée à ses heures, révoltée par la grandeur d'un monde sans pitié.

Mardi 24 août 2010 à 18:41

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Il n’était plus tout à fait « le jeune homme », mais il n’était quand même pas devenu « l’homme ». Sa blondeur et ses yeux clairs, paraissant plus faits pour se perdre dans des rêves que pour regarder la réalité du monde, lui donnait un charme qui sans être efféminé, manquait un peu de virilité. Il avait selon la mode du jour, les cheveux assez longs mais sans l’exagération qui frise le ridicule. Il portait aussi une cravate, à la teinte et aux dessins discrets, se détachant sur une chemise propre : ce qui le différenciait déjà d’innombrables garçons de sa génération. Bien qu’il fût assis, il paraissait être plutôt grand, mais la carrure avait tendance à se voûter : relâchement de la silhouette qui semblait provenir d’un accablement moral plutôt que d’une réelle déficience physique. Peut- être suffirait-il d’un rien pour que le buste se redressât ? Mais l’homme le pourrait-il par le seul miracle de sa volonté ? N’avait-il pas besoin d’une aide, quelle qu’elle fût ? Attablé devant un demi, il ne s’intéressait guère au va-et-vient incessant qui se produisait devant lui. Rien ne pouvait l’arracher à sa torpeur silencieuse : ni le courant ou contre-courant de clients qui entraient ou sortaient, ni le ballet des garçons qui accomplissaient des prouesses pour porter sur leurs plateaux aériens les consommations de table en table, ni le bruit des soucoupes ponctué par le crépitement de la caisse enregistreuse, ni le brouhaha confus des conversations, ni toute l’atmosphère- dégoulinante de vie- qui régnait dans ce café. Le visage du solitaire était rasé et presque beau, malgré les traits tirés, ravagés comme ceux de quelqu’un qui vient de passer une ou même plusieurs nuits blanches. La bouche n’était pas grande, mais les lèvres minces n’avaient cependant aucune expression de dureté. Le menton, auquel l’ossature assez anguleuse aurait pu donner une allure volontaire, paraissait flasque sous l’effet du désarroi, ou du chagrin. Ce pouvait être aussi un homme qui avait faim- qui le cachait. Mais faim de quoi ? Depuis combien de temps était-il là, avachi devant son verre à moitié vide ?

Par Dylanou le Mardi 24 août 2010 à 20:45
Je trouve que les descriptions qui tiennent en longueur sont si difficiles à mettre en place, comme si je manquais toujours de mots, que la langue française était soudain réduite à la banalité des couleurs et des formes vues sous l'angle d'un enfant.
Tu sais passer à travers.
 

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